mercredi 2 décembre 2009

Agathe Uwilingiyimana

Agathe Uwilingiyimana a été tuée début 1994 par des milices fanatisées à Kigali devant les représentants de l'ONU. Et pourtant cette femme courageuse et intelligente était le Premier Ministre de son pays. Hutu modérée, elle s'opposait pacifiquement à une marée effrayante de haine, de terreur et de mise à mort sans pitié. Elle pratiquait les vertues de la citoyenneté et de l'engagement généreux au prix du sacrifice de sa vie.

Agathe Uwilingiyimana est une des 800.000 victimes du génocide rwandais. Des hommes, des femmes, des jeunes, des gosses, des bébés ont été exterminés en subissant des tortures cruelles et presque inamaginables. Tout cela s'est passé à quelques heures de vol d'ici il n'y a que 25 ans. Dans le monde dit libre et civilisé, nous en étions témoins et nous ne sommes guère intervenus. Moi-même, j'avais 44 ans, étais père de 6 enfants et assumais un poste à responsabilité dans un ministère luxembourgeois. J'ai eu honte quand je visitais, il y a quelques jours, le Mémorial du génocide à Kigali.

Le pays des mille colines, au coeur de l'Afrique, indépendant depuis 1965, fait face depuis l'épreuve du génocide, à un défi extraordinaire: la réconciliation d'un peuple qui était divisé en des classes - en parlait de "races" - différentes, les hutu et les tutsi; la réconciliation des auteurs de crimes abjects, orchestrés par des meneurs irresponsables, et les "rescapés" devant les yeux desquels on massacrait conjoints, parents, enfants. Très souvent, sur leurs colines, ils sont obligés, au jour le jour, de retisser des liens de cohabitation et de voisinage. Et ils réalisent, tout en vivant des émotions des plus denses, qu'en tant que communauté rwandaise ils n'ont pas le choix.

A mes nouveaux amis rwandais je souhaite l'esprit de leur ancien premier ministre, Agathe Uwilingiyimana. Je leur souhaite le courage et la générosité d'innombrables autres Rwandais, femmes et hommes, tutsi et hutu, de toutes religions et croyances, qui, dans les semaines du génocide, ont pratiqué les vertues humaines et citoyennes.

Le Mémorial de Kigali réserve une salle particulière aux autres génocides de l'histoire récente. Il n'y a pas de quoi être fier. La liberté, la démocratie, le respect, la fratermité constituent des biens fragiles qui requièrent en permanence notre vigilance, notre engagement et notre civisme. En ce sens, Agathe Uwilingiyimana peut nous inspirer, nous qui vivons loin du Rwanda!

Schoos, le 2 décembre 2009.

Mill Majerus

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